De l'origine du mythe des rosiers en bout de vigne
On voit souvent, surtout dans le bordelais, de beaux rosiers bien taillés au bout des rangs de vigne, surtout sur les parcelles visibles depuis la route ou à l'entrée des domaines.
La photo ci-jointe a été prise à St Tropez, sur les bords d'une belle villa à piscine au coeur d'un vignoble bio.
Ça fait parler c'est sûr, c'est beau, ça demande de l'entretien, et en plus il y a un mythe que le rosier est un témoin de l'arrivée de l'oïdium sur la vigne. Le rosier permettrait d'anticiper la maladie de la vigne et de traiter à la bonne date et à la bonne dose.
Ne serait-ce pas alors un indicateur agro-écologique gage de biodiversité? (cette phrase est là pour cumuler les hashtags à la mode et attirer du monde).
C'est très joli tout ça mais on s'éloigne de la vérité technique: l'oïdium du rosier ou " blanc du rosier " (Podosphaera pannosa) n'est pas le même champignon que l'oïdium de la vigne (Erysiphe necator), ils ont donc des comportements différents selon le climat.
Evidemment ils se ressemblent, leurs fructifications blanches sur l'envers des feuilles et leur sensibilité au soufre les rapprochent. Par contre, l'oïdium du rosier est moins sensible à l'humidité et plus sensible au vent que celui de la vigne. Ce dernier a tendance à fructifier plus précocement en Provence, au contraire du bordelais.
Pour être juste on pourrait dire que l'apparition d'un feutrage blanc sur les rosiers de Gironde pourrait permettre d'anticiper la sortie d'oïdium sur les vignes mais hélas, lorsque le rosier est blanc il est trop tard pour qu'un soufrage des vignes soit efficace...
En effet, l'oïdium de la vigne met environ 6 semaines entre l'arrivée des spores sur la vigne et l'apparition des premières taches. Faire un soufrage 1 semaine avant l'apparition des taches aurait donc déjà 5 semaines de retard. Rien ne vaut le préventif!
J'ai aussi entendu que les rosiers faisaient venir les abeilles pour polliniser les fleurs de vigne et garantir une bonne production. Balayons tout de suite cette possibilité, la pollinisation des fleurs de vigne aux arômes entêtants et à l'origine de gnôles orgasmiques se fait sans insectes, par autopollinisation ou par le vent (pollinisation anémophile).
Donc à quoi servaient vraiment les rosiers?
Une explication crédible serait que lorsque les chevaux faisaient tout le travail du sol, grâce à des charrues ou des griffes trainées, il fallait éviter qu'ils ne tournent trop vite au bout du rang et que la charrue arrache les derniers pieds. Le rosier par son piquant et son volume permettait donc d'élargir le tour au bout des rangs.
Explication moyennement probable à mon avis, moins que le simple souci esthétique et éventuellement un revenu supplémentaire suite à la coupe des roses.
Voilà donc, au nom de la rose, un voile de légende qui s'envole.
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